Caprice et moi….
Tout à commencé lorsque j’avais 14-15 ans. J’étais en vacances chez ma cousine, Melany, qui avait 8 ans mais montait déjà depuis ses 5 ans.
Elle avait une double ponette en demi-pension. C’était déjà une grise.
Elle pouvait donc s’en occupper beaucoup. C’était un très chouette petit manège, très familial. Melany était déjà fort douée, connaissait déjà la longe et… elle à été ma première monitrice
. Elle m’a laissé monter la petite jument, et même déjà faire un petit galop, en longe, en me tenant au pommeau.
Le “mal” était fait… j’étais mordue.
Après autorisation de mes parents, j’ai été me renseigner dans un manège proche de chez moi, à Meer (un bled entre Neerheylissem et Tirlemont). Maman était craintive (une jeune fille s’était tuée à cheval lors de sa jeunesse, dans son village, à Orp), mais comme je n’avais aucune activité, ils étaient plutôt contents que je pratique un sport. Et ont acceptés. Je me délaçais encore en vélo, donc je n’avais pas encore 16 ans. (J’ai acheté ma mobylette à 16 ans
).
Alors, je ne sais pas si c’était un “mauvais” manège, mais le port de la bombe n’était pas obligatoire. Recommandé, certes, mais j’ai fait plein de reprises tête-nue. Au premier Noël, j’ai demandé qu’on m’en offre une. (Une bête coquille, avec, à l’époque, un simple élastique. Même pas de jugulaire à “trois points”.) Premier cheval: “Napoléon”. Un petit vétéran d’environ 25 ans. Un gris. Ben voyons.
Je commence à m’améliorer. On me propose de monter “Kobalt”, une jument baie foncé, très tonique, très belle, toute fine, toute racée. Elle appartient à une fille que je connais de l’école, le manège possède l'autre demi-pension.
Ca se passe bien, pendant plusieures reprises. Un soir, au galop (les autres étaient en cercle, j’étais sensée galoper seule, l’autre cercle), sans que j’en retrouve la raison, elle m’a embarquée d’une façon incroyable. Un vrai rodeo. Le problème, c’est que je me suis pris le pare-bottes méchamment, et que je suis restée allongée, complètement paralysée, quelques minutes. Pendant ce temps, le moniteur longait la “furie” pour la calmer. Les autres, toujours en cercle, me regardaient. Stefan (ah oui, c’était en néerlandais) à quand même eu le bon réflexe de me remettre dessus, dès que j’ai retrouvé le contrôle de mes membres. Je crois que c’était ma première frayeur, à cheval.
Je crois que j’ai quitté peu après. Assez bizarrement, comme je l’ai appris par la suite, on m’amenait toujours un cheval équipé. Je n’ai pas appris à bouchonner, ni à seller. Rien. Ni de promenades. Je ne me suis fait aucune copine. On ne se parlait pas. Je montais, puis je m’en allais.
Ils avaient des Jack-Russel, et un bar. Vu que c’était sans doute le seul dans tout le bled, plein de gens, qui n’avaient rien à y faire, y étaient. Ce bar était un peu glauque.
Mon père, en se promenant en voiture, avait repéré un manège à Jodoigne. On y va ensemble. C’est le manège où j’ai acheté Caprice, mais on y est pas encore.
On en croit pas nos yeux. TOUT EST IMPECCABLE ! Une petite piste à longer, une énorme piste extérieure en contrebas, mais vraiment énorme. A mon souvenir, plus grande que les trois pistes de “Hertog Jan” réunies. Les box sont nickels-chrome, tous les chevaux, même les chevaux de manège sont sur copaux. (avec le recul, je trouve ça plutôt moche pour eux… rien à grignoter… rien à chipoter…).
Le haut des box sont décorés de boules dorées. Pas le moindre Jack-Russel.
Un énorme camion pour chevaux stationné. Jaune canari, le camion. Nickel-chrome, également.
En effet, Monsieur était champion, cavalier international. La boss du manège, Maika, (une espagnole) l’avait été, mais quitté la competition.
Le manège est ENORME. Pas de bar (ça c’est bien) mais un frigo avec des softs.
J’apprends à seller et à bouchonner. Et on me dit que je viens d’un manège “bof”. Ben voyons.
J’ai monté les chevaux de manège, certains faciles, d’autres moins. Notamment “Germain”. Il avait une robe speciale. Il avait la particularité d’avoir la machoire “de travers”. On m’a dit qu’il s’était pris une chotte de sa maman lorsqu’il était poulain. Quand on le suivait de trop près, en reprise, il chottait aussi. J’ai eu aussi “Darby”. Très grand (j’ai été souple, par le passé
). Même plus grand que Tonic. Alezan avec une liste. Et très gentil.
Je montais là depuis environ un an, il a été question qu’il allait être mis en vente, Darby. C’est alors que j’ai commencé à travailler dans l’horeca comme étudiante, pour l’acheter. J’avais donc 16 ans (je servais en salle). Finalement, Darby n’a pas été vendu. Je conserve néanmoins mon travail. (deux soirs ou après-midi par weekend).
J’ai fait un premier stage génial, à jodoigne. Très enrichissant, car les cavaliers avaient mon niveau, et mon age, mais certains autres étaient adultes. Mon père trouvait ça un peu fort, pour (je crois) 500 fb pour une semaine, on fasse les box. Mais j’y ai appris énormément. Et je m’endormais à 20 h tellement j'avais donné
. Et puis, je payais mon stage avec mon propre argent. Je pense que c’est alors que j’ai appris à sauter; des petites croix et des petits oxer.
Je continue à monter. Les chevaux de manège me lassent. Même Darby. Trop conciliant. Ils ne font jamais de bétises. En promenade, ils sont exemplaires. Je m’ennuie. Et monter ne me suffit plus; je suis tellement mordue que je veux pouvoir m’occuper d’un cheval à 100%.
Eté suivant. Terrible. Tous les stagiaires étaient enfants mais vraiment jeunes enfants (j’avais 18 ans, je venais en mobylette, et j’en ai retrouvé un a faire le clown dessus, au risque de la faire tomber. Je crois que je l’ai étouffé dans un box.) et debutants. Vraiment debutants.
Ma monitrice me prend à part, m’indique qu’ils ont une jument à vendre, une nouvelle, que je peux “l’essayer” la semaine, quitte à me prendre en leçon particulière tout le stage, et que je dois donner ma decision en fin de semaine. On me fait aussi miroiter le brevet de “premier degré”. Que la plupart de mes “copines” ont. Mais pour passer l’épreuve, il faut être “propriétaire”. C’est ce qu’on me dit. On pousse pas un peu à l'achat...
Je suis une vraie “pétasse” à l’époque. J’évolue dans un monde de gens riches – que je ne suis pas. Ces enfants, de ce dernier stage, n’en avaient rien à faire des chevaux. Combien de fois, je n’ai pas eu le coeur serré en en voyant un, tirer immodérément dans la bouche d’un poney de manège, alors que ce n’était pas nécessaire. Leurs parents les mettaient là pour en etre débarrassés, la semaine. Ces enfants, jouaient juste au Cow-boy. Patricia de “Hertog Jan” n’aurait jamais toléré ça, je crois. La déchéance du manège était en route. Rumeurs de rupture entre Maika et son mari.. Maika n’enseignait d’ailleurs plus, depuis longtemps. On a eu une petite espagnole, que j’ai vu monter (notamment Caprice) et pas si bien que ça. Lorsque Maika montait, c’était un délice à voir; on ne s’improvise pas championne. Quand Myriam montait, c’était juste “normal”.
On me présente la jument.
Elle est petite (je ne l’ai jamais toisée, mais je dirais 165 cm?). Grise pommelée (ah? Tiens….). Fine. Racée. Chanfrein d’arabe. Un peu trop maigre (on y reviendra). Des allures incroyables.
Elle me jette par terre. Je n’ai plus connu ça depuis Kobalt. Je dis “je la veux”.
Tout s’est précipité. J’étais, soudainement, reconnue dans un manège prout-prout-de-riches. J’étais beaucoup trop fière, à l’époque. La pression du brevet pesait sur moi. Et d’être “propriétaire” et reconnue. Et d’enfin, de pouvoir m’en occuper, de A à Z.
En repise, sur la gigantesque piste extérieure (cette piste permettait au moins 3 reprises, voire 4, et une “piste” pour les obsacles.
Caprice devient “dure en bouche”. Je n’ai plus la main. (d’ailleurs, vers la fin, je lui mettais un mors “Pelham”. Un machin abominable. Avec gourmette… si seulement j’avais su qu’elle était si jeune, et si j'avais été bien encadrée, je n'en serais pas venue à ça…
Elle se transforme en bombe; la monitrice Myriam le constate, et me met en milieu de piste, alors que les autres galopent. Je suis trop stressée, et Caprice veut démarrer. Je la sens “chaud-boulette”. Son depart au galop était toujours très brusque. Je la tiens fort devant, et je suis tellement crispée que je serre sans doute trop les jambes. Ca s’est passé si vite. La jument fait comme une “foulée” de galop, et je me retrouve au sol. Elle s’était en fait cabrée tout droit. De ceux qui l’ont vu, elle a eu beaucoup de chance de ne pas se retourner, car elle était toute droite.
Elle a fait ensuite un tour de piste (de toute la grande piste) au grand galop. Et quand je dis “grand galop” et qu’elle a “beaucoup de sang arabe”… c’était incroyable.
elle a ensuite voulu fuir. La boss du manège, Maika, qui passait justement, s’est postée devant la sortie, bras écartés. Un autre cheval se serait “dérobé”, ou aurait stoppé net. Pas Caprice. Elle est joyeusement passée SUR Maika. Le problème, c’est que d’autres enfants descendaient vers la piste extérieure. Pas d’accidents.
Le bruit s’est rapidement répandu que je montais une furie. A ma grande honte (maintenant), j’en tirais une certaine fierté (alors). Même les parents des cavaliers en parlaient.
Oh, j’oublie de parler de ma première ballade avec elle. Toujours en stage, avec les tous jeunes. Je suis en bas de file. Chantalle, la monitrice, propose un petit galop. (On était dans un champ, avec l’autorisation de le traverser après moisson…) la consigne était de rester en file, et surtout PAS dépasser les autres. Caprice, voyant les autres démarrer, prend un depart fénoménal. Je n’ai jamais ressenti autant de puissance sur aucun autre cheval. Evidemment, elle à vite fait de dépasser toute la file, monitrice incluse, qui me crie de l’arrêter avant le champ de maïs. Parce qu’il y avait un gros trou entre les deux. J’arrive, tant bien que mal, a reprendre en main la jument et à la remettre dans un petit galop. Je n’ai jamais eu un pareil “bloc de béton” en main. D’où les mors plus “durs” par la suite.
J’ai eu mon brevet du “premier degré” finalement. Qui ne m’a jamais servi à rien, mais qui avait sa valeur dans ce monde prout-prout. Il y avait 3 épreuves: théorie, obstacle et dressage. La théorie m’a valu la gifle la plus méritée de ma vie de la part de mon père. Je prétendais souvent que je n’arrivais pas à suivre, à l’école, que je ne savais pas étudier. J’ai eu 200/200. L’obstacle n’était pas un probleme, Caprice calculait seule ses foulées. Dressage… je n’arrive déjà pas à m’arreter convenablement en X pour saluer… un fiasco, mais j’ai eu le papier quand même.
Une jeune fille, rencontrée au manège et qui aimait bien ma jument, n’a plus voulu la prendre en ½ pension.
Même avec mon travail, je ne pouvais pas assumer les 15.000 fb par mois toute seule indéfinniment.
Pendant ce temps, j’ai décroché de l’école. Je ne voulais plus faire que Gesves, ou Bilzen, les écoles d’équitation. Nous avons visité les deux, avec mes parents. Comme ce n’est financièrement pas possible, ça ne s'est pas fait.
Un petit manège s’ouvre, juste à coté de chez moi. Tout simple. Sandra (la boss) possède quelques chevaux. Elle est kiné. Se pretend kiné pour chevaux aussi (…). On emmène Caprice, toute emmaillottée pour le petit voyage, Maika me court derrière en me proposant de la prendre, elle, en ½ pension, pour le manège. Mais si j’ai acheté un cheval, c’est pour qu’elle ne devienne pas un “cheval de manège”, justement.
Je quitte le luxe de ce manège prout-prout, pour un cadre plus convivial. J'y fais enfin des amis.
On fait des promenades. Bcp des copains sont proprio, donc je ne paye rien. Mais j’ai peur de Caprice. En fait, je monte plus volontiers les chevaux de Sandra que la mienne…. Quelque chose était cassé, avec Caprice.
Un jour, nous étions en promenade, avec Sandra, et deux autres amies, dans les sentiers dans les champs. Les chemins étaient piégeux, très gras, très mouillés. Je refusais de galoper. Les autres étaient ferrés aux antérieurs, Caprice était ferrée à 4. Indépendamment de ma crainte pour elle, le terrain n’était pas bon. Je le sentais mal.
Sandra et l’autre, devant, radotaient derrière mon dos (j’aurais été mieux derrière mon bouquin que sur un cheval à les emm*rder…) Mais le cheval de Sandra est tombé, juste devant moi. Pas de casse, pour le cheval ni la cavalière…
Sandra propose un petit manège, avec uniquement une piste extérieure. Pendant très longtemps, il a été impraticable à cause de la météo. Les chevaux s'enfonçaient et Caprice avait des crevasses. J’ai encore décidé de quitter.
Cap vers “Vissenaken” (toujours près de Tirlemont). Ils pratiquent la thérapie à cheval, pour les moins valides, et les personnes qui souffrent d’un handicap mental. Des fois, quand je venais le midi, le manège était effectivement occupé par ces personnes. C’était très touchant, de voir ces personnes (notamment des trisomiques) s’appliquer à diriger leur cheval… avec un grand sourire…
Peu voir pas de progrès avec Caprice. En reprise, ça va, mais quand je la monte seule… Vraiment très “bof”. A mon gout. Et finalement, je me dégoûte des reprises collectives.
je prend enfin la decision de la sortir en promenade, seule. C’était pour ça aussi, que je révais d’avoir mon cheval. Promener, seule. Rien que mon cheval, et moi. A quoi bon en avoir un si c’est pour toujours monter en reprise?
Ce n’était pas mal, mais elle était tellement imprévisible…. Je l’ai fait très rarement. Caprice, une fois m’avoir mise au sol, se barrait. Terriblement imprévisible et dangereux.
Un moment particulier, je me suis ramenée un midi… elle était couchée dans son box. Je ne l’avais jamais vue couchée. J’ai déposé tout doucement sa selle devant le box, pour ne pas l’effrayer… j’ai ouvert, avec beaucoup de precautions, le box, et je me suis couchée près d’elle. Au risque qu’elle se relève, par instinct. Mais elle est restée couchée près de moi, ses beaux grands yeux plongés dans les miens. Inoubliable.
Un autre jour, elle m’a accueilli, avec un tout légèr hennissement, comme si elle ronflait. Elle était contente de me voir.
Un autre très bon moment, je reviens un midi, et mon voisin de box allait promener. Son cheval est un Frison !! Magnifique. Gigantesque, évidemment. Il me propose de sortir promener avec lui et j’accepte avec plaisir. Il sentait ma peur, et on a pas galopé.
Un des points pour lesquels je l’ai choisie, donc son dynamisme, me retombait dessus. On a juste allongé le trot (pas que j’avais tellement le choix, même avec un mors très dur).
J’ai parlé avec le monsieur, il était très comprehensif. J’ai quand même rencontré de très chouettes personnes durant ce temps.
Malgré celà, et bien des mois plus tard, j’ai décroché… quand j’allais au manège, c’était le plus souvent pour la lacher dans la piste, et admirer ses magnifiques allures.
Personne ne voulait prendre Caprice en demi-pension. Le boss du manège m’a proposé la somme de 50.000 fb, avec materiel, pour la reprendre. Au moins, on s’occupait d’elle.
Celà saute aux yeux (maintenant) qu’elle n’avait pas 13 ans… Marianne vient de me le dire en face, il y a une semaine. cette puce n'avait que 6 - 7 ans. Elle n'aurait plus eu ce gris pommelé à 13 ans. Et ça se voit à son aspect général aussi.
Des gens cupides m'ont fait acheter une jument bcp trop jeune pour mon niveau. J'ai été dégoutée pendant 10 ans (pas des chevaux, mais de l'équitation).
Oh, Caprice, je suis désolée…